Montmirail, sur la terre comme au ciel.


Dans la rubrique précédente, on a vu que Montmirail se trouve historiquement et géographiquement à la croisée des chemins. Du point de vue de l’administration religieuse, Montmirail est également frontalière : elle est d’ailleurs passée du diocèse de Chartres au diocèse du Mans en 1801.

le clocher et le donjon

Son église paroissiale est dédiée à Notre-Dame de l’Assomption, vocable rappelant la montée au ciel de Marie, mère de Jésus-Christ.

L’édifice actuel date essentiellement du XVI° siècle, avec des marques remontant au XIII° siècle.

Il y a continuité du culte catholique avec des prêtres nommés par l’évêque. En bénéficiant toujours du caractère traditionnel de la liturgie, les offices religieux à Montmirail élèvent l’âme vers le sacré, et les prières vers le ciel.

Il n’y a eu ni rupture ni bouleversements religieux. On y retrouve : la liturgie de toujours, la messe catholique en latin dite messe « de Saint Pie V » « tridentine », les gestes intemporels qui nous maintiennent en lien avec les anciens qui nous ont précédés et en lien avec l’éternité, les chants grégoriens (en latin comme à l’abbaye de Solesmes, bien connue des Sarthois… et du monde entier), mais aussi des moments de silence qui conviennent au recueillement et à l’écoute de la Parole de Dieu.

Les fidèles du pays ou simplement de passage y déposent toujours leurs prières et leur culte à Dieu et ses saints, et y reçoivent l’enseignement, les conseils et les sacrements de l’Église pour mieux conduire son pèlerinage terrestre. On reconnait le prêtre à son habit intemporel et distinctif : la soutane.

1991 – abbé Rouxel et les communiants

Comment se reçoit et se partage cet héritage à Montmirail aujourd’hui ?

Simplement, avec fidélité, naturellement et comme toujours.

En effet cette culture du Beau a façonné la France, nos bourgs, petits ou grands. Cette culture religieuse et chrétienne se transmet concrètement et de manière incarnée : par les cloches, les chants, la musique sacrée à l’orgue, les habits sacerdotaux ouvragés, la lumière des cierges et des vitraux, l’encens, les gestes méticuleux selon un rite éprouvé…

À Montmirail, on a conservé non seulement ce patrimoine matériel avec tous les beaux objets confectionné ou acquis par nos anciens, mais aussi on a conservé le patrimoine immatériel de la Foi et des autres forces morales et spirituelles. Au centre de l’Église reste le Tabernacle, avec la présence de Dieu vers Lequel nous nous tournons tous.

Ainsi, les mises en garde répétées des papes successifs contre le matérialisme d’une part et contre les innovations excentriques d’autre part, ont été écoutées. Cette obéissance et fidélité ont permis de préserver vivaces les pratiques qui rendent attentifs à la grâce et le désir du Salut. Ces actes de Foi apportent de nombreux bienfaits et consolations dès ici-bas.

La liturgie traditionnelle, dite aussi “extraordinaire”, est très incarnée et très spirituelle. Cette liturgie touche nos cœurs et nos âmes en nous plongeant dans le sacré, quelle que soit notre situation morale, sociale, d’âge, etc.

Cette présence religieuse avec ce caractère traditionnel contribue sûrement à l’identité du village qui a su rester lui-même sans se couper du monde ni céder à ses crises contemporaines.

1994 – parcours de procession Fête-Dieu

Quelles sont les traditions religieuses à Montmirail ? Qu’est-ce que la Tradition ?

Dans un sens culturel, chacun expérimente ce que sont les traditions : ce sont les coutumes, les manières particulières de vivre, les multiples rite qui rythment notre existence, que l’on a reçus et que l’on perpétue avec un pieux souvenir de nos anciens qui lest ont vécus avant nous. Dans chaque famille, il y a des traditions familiales, qui nous relient à nos aïeux qui nous ont transmis la vie et tout un héritage civilisationnel.

chappe ouvragée (Montmirail)

Dans le sens religieux, la Tradition désigne la manière de la pratique religieuse chrétienne, avec le développement de l’Église depuis son origine. En effet, il y a le contenu de l’enseignement et de la Foi, et la façon de l’exprimer et de la pratiquer dans le culte, à la messe spécialement. La Tradition est la pratique religieuse vivante, sans rupture ni excentricité, qui nous relie dans le temps avec le même Esprit depuis l’enseignement de Jésus puis l’évangélisation par les apôtres. La Tradition et la Parole de Dieu ne sont pas des accessoires de la religion : c’est l’héritage sacré, centré vers Dieu et sans césure. La Tradition n’est pas non plus la fixation dans un rite qui serait recherché en tant que tel, ni une “reconstitution historique” comme du spectacle : c’est un attachement à un rite, forgé et enrichi au travers de la vie de l’Église et de ses saints, pour nous tourner vers Dieu. Sans Tradition, comment ferions-nous pour prier ? Nous serions comme des égarés livrés à eux-mêmes, en proie aux tâtonnements ou aux extravagances, alors que nous bénéficions au contraire de tout un héritage spirituel qui a produit des fruits excellents. Tout chrétien participe à la Tradition dans la pratique religieuse commune, et le pape, les évêques et le clergé en général ont plus spécifiquement la mission de protéger le contenu de la Foi enseignée par Jésus, et de la répandre dans notre vie spirituelle.

À Montmirail, avec les messes et solennités habituelles, on retrouve de belles traditions religieuses rurales. Elles restent un témoignage émouvant qui a perduré jusqu’à nous. (On en retrouve quelques exemples dans la rubrique “Souvenirs” de ce site). Elles n’attendent que la visite des fidèles, débutants ou confirmés, pour se transmettre : processions de la Fête-Dieu, pèlerinage de St Marcoul, distribution du pain bénit, messe pour la fête des ouvriers-laboureurs, rogations, messe de St Hubert…

Un prêtre est toujours là pour donner de l’eau bénite, accompagner les étapes de la vie chrétienne, le baptême, le catéchisme, la confession, la communion, le mariage, l’onction des malades ou extrême-onction, la sépulture…

circa 2000 – procession de la Fête-Dieu avec l’abbé Fournier

Dans la Tradition, il y a du latin. Pourquoi ? Je ne comprends pas le latin…

Il y a beaucoup de latin à la messe, et beaucoup de messes en latin dans le monde. Pourquoi ?

Le latin a été conservé et il présente de nombreux avantages, non pas pour cacher mais au contraire pour permettre à l’Église en entier d’exprimer ensemble les mêmes paroles avec le même sens.

D’abord, rappelons que le latin est la langue des textes officiels du Vatican. Cette langue ancienne n’évolue plus, ce qui limite les problèmes d’interprétation dans des langues courantes qui évoluent au fil des générations. Le latin est ainsi devenu une langue à part. Ne servant ni pour le commerce, ni pour les échanges utilitaires de tous les jours, elle remplit bien un rôle de langue réservée pour le sacré. Cette langue nous aide à être attentif, à nous rappeler à qui nous nous adressons : le prêtre s’adresse à Dieu. Enfin, le latin est devenu une langue universelle : la plupart des prières de la messe se retrouvent à chaque messe, alors on finit par apprendre (assez facilement pour nous les Français, étant donné que le français est une langue latine), avec un missel, les prières régulières de la messe (on l’appelle : “l’ordinaire de la messe”), si bien qu’en assistant à une messe en latin n’importe où dans le monde, on peut suivre l’essentiel de la messe. Au contraire, lorsqu’on voyage, il est bien difficile de suivre une messe en espagnol, en anglais, en allemand, en portugais… Tandis qu’à une messe en latin, on peut aisément prier ensemble avec un italien, un américain, un africain, et ce sans tentation d’imposer une langue ou une nation sur une autre.

On dit que la messe est “en latin”, mais en réalité les lectures (épitre, évangile) et le sermon sont en français ! Et tout ce qui est en latin, on le retrouve en français dans son missel.

la crèche de Noël à Montmirail

En pratique, comment visiter une église ? Comment assister à la messe ?

Chacun peut entrer dans une église; chacun peut venir écouter la messe, dans une tenue et une attitude intérieures et extérieures respectueuses : tenue vestimentaire correcte et décente, respect du silence, écoute. Pour la messe traditionnelle, on peut très utilement se munir d’un missel pour suivre certaines prières en latin. Toutes les lectures de la messe sont lues par le prêtre en français.

En pratique, comment recevoir la Sante Communion ?

Nul n’est tenu de communier à l’Eucharistie lors de l’assistance à la messe, et personne n’est jugé s’il ne communie pas. Ceux qui veulent recevoir la Sainte Communion à l’Eucharistie doivent être dans les dispositions requises par l’Église.

Communier à l’Eucharistie n’est pas automatique à la messe ! Si l’on n’est pas prêt, tant du point de vue des dispositions intérieures (ex : on a l’esprit ailleurs, on n’a pas encore pu confesser un pêché grave…), que les dispositions extérieures (ex : on n’a pas pu être à jeun), alors on n’est pas prêt pour s’unir à Dieu dans la Sainte Hostie. On peut en revanche toujours s’unir à Dieu par le désir et l’intention de le recevoir dans nos âmes, avec la volonté d’écouter sa Parole, de se laisser aimer par Lui et de Lui rendre nos hommages intérieurs en retour : c’est la prière.

bannière de procession (Montmirail)

Pour recevoir la Sainte Communion au Corps du Christ, c’est à dire l’hostie consacrée, il faut : être baptisé catholique, avoir “fait sa première communion” (c’est à dire avoir déjà reçu la Communion une première fois avec la préparation et l’accompagnement spirituel d’un prêtre), ne pas avoir de pêché grave non confessé sur la conscience, être à jeun depuis une heure (ne pas avoir mangé, pas de chewng-gum… Exception : on peut avoir bu de l’eau et pris les médicaments nécessaires), s’êtres bien préparé à s’unir à Dieu.

En outre, dans la forme traditionnelle de l’Église, la communion se reçoit avec les gestes qui expriment et disposent en nous le respect et l’humilité devant le Seigneur et son ineffable don, à savoir Dieu qui s’offre Lui-même pour nous. Ainsi, la communion se reçoit : -à la Table de communion, -le cœur contrit et ouvert à la grâce de Dieu, -à genoux (sauf infirmité qui l’empêcherait), -en disposant ses mains sous la nappe de communion, -le prêtre dépose l’hostie sur la langue du communiant. Personne ne prend la Sainte Hostie dans sa main, mais on la reçoit sur la langue. Puis on retourne à son banc, dans une attitude recueillie et dans l’adoration, on avale la Sante Hostie : on laisse le Verbe de Dieu agir en nous et nourrir nos âmes et nos cœurs.

La très belle Piéta de Montmirail

Je ne connais pas Dieu, je ne connais pas l’Église, je ne connais pas la Tradition, j’ai oublié mon catéchisme, j’ai perdu l’habitude d’assister à la messe, je ne sais plus prier, je ne sais même plus la prière du Notre Père par cœur : que faire ?

Si nous avons oublié Dieu, Lui ne nous oublie pas.

Plus on est éloigné de Dieu, plus on est prioritaire dans le Cœur de Dieu. Le Seigneur attend, et il souffre patiemment en attendant qu’on réponde à son appel. Son Amour s’accompagne d’un désir: Il a un grand désir de nous recevoir parmi ses brebis.

Jésus a vécu notre condition humaine. Il connait nos faiblesses, nos égarements. Il a supporté les tourments et les souffrances de la vie humaine jusqu’à la Passion, c’est à dire jusqu’à la mort crucifié. Il nous montre son Cœur ouvert, transpercé par la lance du soldat. Cette réalité nous montre et nous signifie qu’il répand sa Vie, son Amour, pour chacun de nous. Ne désespérons pas de nous sentir indignes de Dieu. Personne n’est digne par lui-même pour se présenter devant Dieu Tout Puissant. Depuis le premier pêché des hommes, nous nous sommes tous éloignés de Dieu. Il nous attend pour nous procurer ce dont notre âme a soif : Il veut fêter notre union, notre conversion ou notre retour à Lui. Dans l’Histoire, Dieu s’est déjà révélé, il est déjà présent dans son Église, et notre pays chrétien L’a déjà reçu. Nous avons la grâce immense d’avoir des églises et des prêtres pour prier et recevoir les effets de Dieu sur nous, à travers les sacrements. Tout est prêt, et bien souvent, il ne manque plus… que nous ! Si nous ne Le connaissons pas, si L’avons oublié, par négligence ou en Le mettant en second rang alors que la place qui revient à Dieu est évidemment la première, au cœur de nos vies. Alors, ce n’est pas Dieu qui nous rejette mais nous qui nous sommes écartés de Lui. Le Dieu Tout Puissant est aussi infiniment Bon : Il n’impose pas son Infini à nos êtres limités : Il attend que l’on se tourne vers Lui librement. Ceci commence très simplement : venir Le visiter dans sa Maison, tourner son cœur vers Lui en faisant silence et en mettant son être à genou devant le Tabernacle.

La messe et les sacrements sont donnés pour les humbles, les faibles et les pauvres pêcheurs. Qui peut se croire parfait et ne pas avoir besoin de recourir à l’aide de Dieu pour traverser la vie et la mort ?

Dieu a appelé des hommes pour se consacrer à Lui et et transmettre aux hommes la Parole de Dieu et les sacrements : ce sont les prêtres. Ainsi, le prêtre accueille toute personne sincèrement désireuse de mieux connaître Dieu, et il l’aide à apprendre à L’aimer, à L’écouter, à Le suivre. La vie du prêtre est consacrée à Dieu, et dans le domaine spirituel les prêtres sont nos pasteurs pour nous guider vers Dieu.

“Venez et voyez !”

Venez rencontrer le prêtre ou des fidèles qui servent déjà Dieu.

Se tourner ou se retourner vers Dieu est simple mais c’est l’homme qui est compliqué ! La belle liturgie de la messe, qu’elle soit silencieuse ou chantée, nous aide à voir et à écouter Dieu. La liturgie, la cérémonie, le rite de la messe nous guide par le visible et le sensible vers d’autres réalités plus profondes, invisibles aux yeux. Puis, recevoir le sacrement, c’est plus qu’instruire ou nourrir notre vie naturelle et sensible, notre intelligence et notre imagination : c’est aussi nous ouvrir et nourrir une vie qui dépasse notre nature charnelle.

“N’ayez pas peur !”

Venir à l’église, écouter la messe, rencontrer un prêtre. C’est si facile, et pourtant personne ne pourra le faire à notre place. On ne rencontre pas l’Amour par procuration. Vouloir répondre à l’appel est le principal effort, puisque Dieu est déjà là… Avec confiance, vouloir être heureux comme Dieu est heureux, et ne pas avoir peur d’un don si grand pour nous.

Dieu est notre Père, notre Bon Pasteur, l’Esprit qui apaise nos âme. Vouloir recevoir les dons que Dieu veut pour nous : la Foi, l’Espérance, la Charité. Comment passer à côté de cette promesse ? Comment perdre ses dons et perdre son temps ? IL nous faut dès maintenant ne plus être infidèles, mais fidèles.

Puisque c’est Dieu qui nous appelle, la meilleure des choses à faire est de venir, et de marcher fidèlement à sa suite, dans l’Église, avec l’aide de la Tradition qui est parvenue jusqu’à nous.

mai 1971 – Montmirail